GERMAIN MOREL MAÎTRE DE FORGES

Conférence du 7 avril 2015 par Gérard Mathern


L'usine Morel - ou ce qu'il en reste, en 1920 avant sa démolition.


Troisième enfant de la fratrie Morel, Jean Pierre Germain est né le 26 novembre 1902 à Saint-Chamond, fils d’Antoine Morel, négociant. Il a onze ans en 1831 et il semble que ce soit à cet âge qu’il entre dans l’usine de son père comme, on l’imagine, apprenti forgeur. Le jeune homme avait quelques qualités de pugnacité et de ressources intellectuelles car il prépara seul, vers 18 ans, le concours d’entrée à l’Ecole de Mines de Saint-Etienne. On peut, ici, penser que les conditions familiales avaient pu aider le jeune garçon car nous savons, à la lecture des possessions futures des Morel, que son frère Louis était « ingénieur civil », et qu’il avait pu, fort de ses neuf années d’aînesse, aider son cadet à franchir les étapes de l’enseignement des matières de base. Il fut admis au titre d’élève titulaire le 3 octobre de cette même année. Mais on a la surprise de découvrir, sur  le registre des résultats du concours final, qu’il n’apparaît pas classé mais seulement dans la catégorie des « non brevetés ». Lors d’une écriture de 1854, il sera noté « directeur de forge à St Chamond » et jamais on ne retrouvera trace d’une quelconque qualification « d’ingénieur des mines » accrochée à son nom.

Il revient donc au sein de l’entreprise familiale non diplômé, mais fort de l’enseignement suivi. Il prend naturellement quelques responsabilités. Il semble qu’il ne soit pas directement associé à la direction de l’affaire familiale. Il ne le sera que plus tard lors d’une vente de parts en 1845. Pendant ce temps, la forge se développe. Antoine Morel se rend rapidement compte que la demande en fers de bonne qualité est très forte et que l’usine doit, pour accroître sa production, se développer. Il faut donc investir. Hélas, le patrimoine familial ne permet pas d’assurer de telles dépenses. Il faut donc trouver des partenaires. Ce sera chose faite dès 1844, en 1845 et enfin en 1847 avec les Maîtres de Forges ripagériens Hippolyte Petin et Jean-Marie Gaudet.

Germain Morel avait eu l’intuition de l’invention des bandages de roues de chemins de fer sans soudure, révolutionnaires pour l’époque. L’entreprise Morel et Compagnie engrange les succès, et devient ensuite la Compagnie Petin, Gaudet,  et Morel et fils en 1851.

Mais dés 1852, la discorde s’installe entre les associés et aboutit à une séparation actée le 22 mars 1852. De nombreuses difficultés étaient survenues, et en particulier un brevet concernant les bandages de roues déposé aux seuls noms de Petin et Gaudet qui aurait pu être à l’origine de dissensions importantes.

La séparation est douloureuse et une nouvelle usine est projetée au Chatelard, non loin des premiers ateliers, par Antoine et Germain Morel. Pendant la construction, les usines Petin et Gaudet poursuivent l’exploitation et captent les clients. A l’ouverture du nouvel établissement, le marché n’existe plus et l’affaire doit être vendue. Germain acquiesce à condition que cela ne soit pas à Petin et Gaudet. Une vente  est donc passée avec deux négociants stéphanois le 16 juillet 1853. Le lendemain, les deux acheteurs déclarent avoir agi en qualité de prête-noms pour messieurs Petin et Gaudet.

Germain Morel sombre dans une véritable dépression. Il quitte, comme le voulaient les dispositions de l’acte de vente, les ateliers le 1er septembre 1853 et on le retrouve au matin du 2 septembre, mort sur le pavé de sa rue, au bas de son appartement au pré-château.

 

Le Conseil Municipal de St Chamond, lors de sa séance du 30 janvier 1871 décida de donner son nom à une place de la ville, et en 1889, son nom également au prolongement de la rue Notre-Dame, reconnaissant ainsi la valeur et l’importance de  ce personnage dans la fondation de l’industrie lourde dans la cité.